Charlotte Gilmartin: à la croisée des chemins ~ Passion/Patin/Vitesse - Passion/Speed/Skating

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1 mai 2018

Charlotte Gilmartin: à la croisée des chemins


La carrière d’athlète élite apporte son lot de périodes de réflexions et de remises en question, surtout à la suite d’événements majeurs bons ou mauvais. C’est dans l’une de ces périodes remplies de points d’interrogation que j’ai rencontré la Britannique Charlotte Gilmartin il y a quelques semaines à la conclusion d’une saison qui pourrait avoir été sa dernière. Vraiment?

Par Carl Savard
Photos par Oscar van Den Bosch (@schaatsfotos), Martin Holtom, Stevie Coughlin et collection personnelle de Charlotte Gilmartin

Enfant, la petite Charlotte a grandi dans une famille peu encline à regarder du sport à la télé, trop occupée à en pratiquer. Elle a tenté l’expérience des arts martiaux avec le jiu-jitsu, s’est adonnée au foot (soccer) et adorait jouer au hockey dans la rue. “J’essayais tout!” me confiait Gilmartin alors que nous étions confortablement installés dans une aire commune au sommet du grand escalier de l'Hôtel Universel de Montréal. Comme plusieurs patineurs européens, c’est sur des roulettes que la petite Charlotte à fait ses débuts sur patins. “Je jouais au roller hockey. Vers l’âge de 12 ans, je suis allé à la fête d’une amie qui avait lieu à une patinoire. Je n’avais chaussé des patins à glace que deux fois auparavant. Sans perdre de temps, je me suis mise à courser et à lancer des défis à mon amie sur la glace. J’ai été remarqué par quelqu'un impliqué en courte piste qui a suggéré que je passe au club faire un essai. Dès le premier cours, j’ai adoré. Je me sentais à l’aise, à ma place. J’ai toujours été très compétitive et après deux ans j’ai joint l’équipe nationale.”

À son arrivée sur l’équipe nationale, on lui a vite demandé quels étaient ses objectifs. À cette époque, l’idée de batailler pour un titre de championne d’Europe ou même de remporter une médaille olympique étaient de peu d’intérêt pour Gilmartin. Elle ne voulait rien de moins que de devenir championne du monde. Vers l'âge de 17 ans, la jeune Britannique commence à remporter des victoires sur le circuit Star Class européen et l’insouciance de la jeunesse lui donne l’impression que le succès sera toujours au rendez-vous, même au niveau supérieur. “Tu penses innocemment que tu vas devenir la meilleure au monde et un jour la réalité frappe à la porte et tu réalises à quel point c’est difficile!” C’est sur un rire chaleureux que cette confidence a culminé. Un rire parfaitement assorti à un incroyable sourire qui fait de Charlotte Gilmartin une jeune femme d’agréable compagnie. “Vers l’âge de 18 ans, j’ai commencé à me demander si je serais vraiment assez forte pour réaliser mes rêves. J’ai finalement participé à mes premiers Jeux olympiques à l'âge de 23 ans et c’est à ce moment que j’ai pris conscience que je voulais à nouveau participer aux Jeux un jour, pour y offrir de solides performances et non me contenter de me rendre en quart de finale. Malheureusement, les Jeux de Pyeongchang ne se sont pas déroulés selon le plan prévu. Après les Jeux de Sotchi, j’ai réussi à gravir les échelons au niveau international et à éviter les blessures et ce jusqu'à cette saison. Je me suis blessé lors de la première compétition de la saison et une autre fois plus tard durant celle-ci. Je me suis présenté aux Jeux olympiques en sachant très bien que je n’avais pas pu faire tout ce qu'il fallait pour être à 100% et en croisant les doigts pour que tout se passe bien quand le temps serait venu de prendre part à la compétition. Tu essaies de te convaincre que tu dois rester confiant, mais ça n’a pas fonctionné pour moi. Je souhaitais avoir une bonne saison, éviter les blessures et tout donner pour par la suite peut-être prendre ma retraite, mais mes plans ont été contrecarrés. Ça n’a pas été ma meilleure saison en carrière et c’est très frustrant. Je n’ai pas encore décidé si je serai de retour la saison prochaine.”


Gilmartin a raison. Elle a connu de beaux moments après les Jeux de 2014, grimpant par le fait même dans le haut du classement mondial. Lors de la saison 2015-16, elle a remporté une médaille de bronze sur 1500m en Coupe du monde à Shanghaï avant d’être couronnée vice-championne d’Europe. La saison suivante, ses performances lui ont permis d’ajouter deux médailles de bronze en Coupe du monde lors des compétitions tenues à Minsk et à Dresden. Bien que digne de mention, ce ne sont pas les résultats qui tapissaient les rêves de la jeune Charlotte Gilmartin il y a un peu plus d’une décennie.

Et maintenant?
Un athlète élite en début de carrière n’a les yeux rivés que sur une chose: la réussite. S’entraîner, offrir de grandes performances, atteindre les plus hauts sommets. Des points de repères nobles qui devront éventuellement laisser place à un certain équilibre, au désir d’avoir une vie personnelle comblée ailleurs qu'entre les murs d’un aréna. Samedi dernier, la jeune femme de 28 ans originaire de Redditch en Angleterre, a uni sa destinée à son compagnon et ex-coéquipier Ian Upcott. Elle sait que sa carrière est avancée et que la fenêtre d’opportunités commence à se refermer et elle a déjà des idées pour son après carrière. “Je crois que quoi qu'il arrive, je serai toujours lié au sport. Après le patin, j’aimerais bien faire une transition vers le vélo. Pas de façon professionnelle, mais juste pour continuer de compétitionner. Mon copain a joint un club local de cyclisme suite à sa retraite du courte piste et il y a des similitudes avec le patinage au niveau des stratégies et du travail groupé. J’aimerais bien tenter l’expérience quand j’aurai pris ma retraite. Pour moi courser, c’est important!” Basé sur ses résultats, la place qu'elle occupe dans l’histoire du courte piste en Grande-Bretagne et cet élan de passion pour la compétition, je n’ai pu m’empêcher de lui demander si devenir entraîneur faisait partie de ses options. “J’aimerais bien sûr aider. Que ce soit au niveau des club, de l’équipe de développement ou de l’équipe nationale. Il y a une part de moi qui désir redonner à ce sport qui m’a tant apporté. J’aimerais aider les jeunes à atteindre leur plein potentiel. Dans un tout autre ordre d’idée, j’aimerais également redonner à la société en faisant le travail de pompier par exemple. Ce sont des avenues que j’étudie présentement et tout ça pourrait se concrétiser à tout moment à partir de maintenant.”

Charlotte Gilmartin est à la croisée des chemins et le choix qu'elle fera dans les prochaines semaines repose probablement sur un seul questionnement: est-ce que la saison 2017-18 était un signe de déclin ou seulement l’une de ses balles courbes que la vie nous lance pour tester notre résilience pendant notre ascension? Dans le cas de Gilmartin, j’irais pour la deuxième option, nous saurons dans quelques temps qu'est-ce que son cœur lui dicte. C'est là que la réponse se trouve après tout. MISE À JOUR: Le 25 mai, Gilmartin annonçait officiellement qu'elle accrochait ses patins. "Le temps est venu d'accrocher mes patins. Ce fût une aventure incroyable dans ma vie. J'aurais énormément de gens à remercier pour cette belle aventure. J'espère avoir l'occasion de le faire en personne sous peu."


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